mardi 20 septembre 2016

Sol Lewitt, Quentin Derouet, "Vivre ou mourir"

Galerie Helenbeck, Nice



                     « Vivre ou mourir » : il est des titres d’expositions qui obligent  à la circonspection et ne trouvent de réponse au questionnement qu’elles supposent,  que dans l’étonnement pour une telle  alternative radicale dans laquelle l’art doit pourtant tâcher de s’inscrire. Cette injonction – appelons là un défi - ne supporte donc aucune idée de flânerie pas plus qu’elle ne se prêterait à la compromission ou à la demi-mesure. En réponse à ce double infinitif on s’attend, quand deux artistes se trouvent confronter à leur exigence, à une approche distendue, à un grand écart,  et pour tout dire, à quelque catastrophe qui viendrait les emporter…

                              Réunir le grand Sol Lewitt, le minimaliste, le conceptuel disparu en 2007 et Quentin Derouet, le jeune artiste, le poète qui se saisit de la rose dans toutes ses déclinaisons plastiques, voilà une gageure qui frise l’insolence.  Un défi qui ne se relève que par une invraisemblable quête de l’impossible ! D’une telle aventure on en sort grandi ou bien, le plus souvent, on y sombre ; le pari est sans rémission possible mais l’expérience est aussi promesse de toutes les découvertes, fussent-elles les plus inattendues.
                        Ce risque, il faut donc s’en saisir et l’assumer avec cette certitude que deux grands artistes ne peuvent mutuellement se faire de l’ombre mais, qu’au contraire, leur confrontation sera source de lumière et que le travail de l’un éclairera celui-de l’autre. La commissaire de l’exposition, Camille Frasca, parvient ici à la sérénité d’un dialogue entre les œuvres là où l’on appréhendait une certaine cacophonie visuelle. Et c'est miraculeux!

                             Sol Lewitt, parce qu’il avait aussi une formation d’architecte, aimait les murs ; ceux-ci n’étaient pas de simples supports mais des constituants de l’œuvre. De même que pour lui le réel se limitait à ces éléments-là, à des couleurs simples et à des lignes qui, au-delà de toute tentation représentative, extirpaient l’essence des choses, leur rythme interne par des effets de juxtaposition, d’ondulation, de vibration… C’est cette vie d'avant qu’elle ne dise que saisit l’artiste. Et c'est aussi cette vie-là que raconte Quentin Derouet, mais dans une toute autre essence: celle des roses. Les lignes et les couleurs de l’un se déclinent dans la matière de l’autre.  Quentin Derouet  s’empare du mur, le mesure à l’empreinte de la fleur et de ses coulures. C’est ce mur  qui dit la vie, l’éros de la rose et le trajet de sa décomposition. Il lit l'oeuvre de Sol Lewitt en même temps qu'il se relie à elle.
                          . Belles et silencieuses, les œuvres se répondent alors  dans ce « vivre ou mourir » avec nulle autre réponse possible que celle que des roses, des formes et des couleurs…


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